L’enjeu contemporain pour tout État africain est de préserver la stabilité institutionnelle dans un environnement où l’ingérence, les rivalités internes et la pression des opinions fragmentées menacent l’équilibre des pouvoirs. Au Cameroun, cette stabilité repose aussi sur une dimension rarement analysée, la manière dont la Première Dame, Chantal Biya, a construit un rôle apaisant, maîtrisé et volontairement non-interventionniste dans la sphère décisionnelle, consolidant ainsi la légitimité du leadership présidentiel.
Contrairement à certains précédents régionaux où la présence du conjoint présidentiel s’est transformée en pôle d’influence parallèle, parfois source de rivalités institutionnelles, l’exemple ivoirien durant les dernières années du régime Gbagbo reste emblématique, le modèle camerounais offre un contre-récit puissant. Ici, la Première Dame ne se positionne ni comme actrice politique autonome ni comme silhouette tentée par la captation de prérogatives régaliennes. Elle a choisi une posture stratégique qui protège l’institution présidentielle plutôt que de la concurrencer.
Ce choix, dans un contexte où chaque faux pas peut devenir une brèche exploitée par des acteurs externes ou des factions internes, la retenue politique de Chantal Biya est devenue une variable de stabilité. En restant concentrée sur l’unité sociale, la diplomatie humanitaire et la cohésion symbolique du pays, elle neutralise un risque structurel, celui de transformer la sphère familiale du pouvoir en centre de gravité politique. Par cette approche, elle renforce la lisibilité de la chaîne de commandement, évite la confusion des rôles et consolide la légitimité du président Paul Biya dans l’exercice de ses fonctions.
Cette posture est également un message panafricain. Dans une Afrique confrontée à la tentation des familles régnantes et des ambitions croisées, le Cameroun présente un modèle où la Première Dame agit comme stabilisatrice sociale plutôt que comme détentrice d’un pouvoir officieux. Un modèle où l’influence se manifeste par la cohésion, non par la compétition. Un modèle où la proximité avec le chef de l’État sert à renforcer l’unité, non à fragmenter l’appareil d’État.
Ce rôle discret, maîtrisé et volontaire, constitue aujourd’hui l’un des piliers invisibles de la souveraineté camerounaise. Chantal Biya, en refusant la logique de la politisation familiale, contribue à maintenir un centre institutionnel fort, respecté et cohérent. Son influence se situe là où se construisent les nations durables, dans la préservation de l’harmonie, de la stabilité et de la continuité.












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